En cette période de célébration de l'amour,

je voulais vous conter cette histoire.

L'amour ce sentiment inexplicable peut aussi envahir

le coeur des fées, mais est-ce là une bonne chose

pour l'objet de cette flamme?

La fée du bois de Longue-Mine



Dans le bois de Longue -Mine vivait une fée.


Elle avait une paire d'ailes arc-en-ciel et de longs cheveux dorés.
Elle n'apparaissait qu'à l'instant fragile où le soleil touche l'horizon.
Sa voix était un chant d'oiseau, son coeur une goutte de rosée limpide.
Elle enchantait les lieux, et protégeait son monde comme le font toutes les fées.

Un jour un chasseur solitaire s'aventura plus loin qu'aucun autre homme
ne l'avait fait. Il traquait une bête.

Lorsqu'il l'eut enfin touchée de sa flèche, la bête agonisante lâcha une plainte
qui réveilla notre fée.
Furieuse la petite créature quitta son refuge diurne, et dans la lumière chaude du jour apparut.
Elle vit la bête ensanglanté et la colère l'envahit.
Aussitôt les arbres séculaires se mirent à tanguer et leurs branches prirent vie.
Le chasseur qui s' apprêtait à charger le corps de la bête, fut saisi par les mille griffes de bois.
La fée rugit et le son qui s'en échappait ressemblait au tonnerre dans le ciel.
"Maudit humain, qui te permet de venir troubler la paix de mon royaume ?
 Et ce faisant elle vit enfin le chasseur tel qu'il était, un très beau jeune homme
 dont les longs cheveux aux reflets de cuivre semblaient éclipser le soleil.

 Il tenta de s'agenouiller devant la fée malgré les griffes végétales qui le maintenaient solidement.
- Oh souveraine de cette forêt, pardonne l'affront que je te fais, mais
cette chair servira à nourrir ma famille.

Et le jeune chasseur d'expliquer que son père défunt ayant laissé sa pauvre
mère et ses cinq jeunes frères sans ressource, il se devait lui l'aîné d'assumer cette lourde responsabilité.

Leurs maigres terres frappées d'un fléau n'avaient données que peu de
récoltes et ils avaient dû vendre la plupart de leurs bêtes pour subsister.
Ils ne leur restait qu'une vieille poule dont les oeufs rares ne suffisaient pour nourrir les sept bouches.

La fée n'écoutait guère les paroles, son coeur de rosée palpitant sous le coup de l'émotion.

Elle venait de tomber amoureuse du chasseur, et ce, bien qu il fût humain.
Aussitôt son sort l' émut, et bien qu il eût tué une créature de son
royaume, elle ne pouvait se résoudre à le punir.

Ses ailes de passion brillaient comme mille diamants.
Elle vola dans un souffle, se posa sur l'épaule du captif et murmura dans
 son oreille :
"je t'accorde mon pardon et je t'offre de venir chaque fois que tu auras
 besoin de nourrir ta famille dans mon bois"

Elle lui montra trois arbrisseaux qui formaient comme une alcôve de verdure
et dessous s'était matérialisée une belle table de ferme, recouverte de
victuailles : il y avait de quoi nourrir les siens dix jours durant.

- Mais il me faut un gage.
 - Tout ce que tu voudras, répondit le jeune homme.
- Alors chaque fois que tu viendras, ce sera avant la tombée de la nuit,
 et cette nuit là tu devras la passer avec moi. Au matin tu pourras emporter
 tout ce que tu voudras de cette table, et n'ai crainte elle se garnira autant
 que tu le souhaiteras.
 - Mais que ferons nous toute la nuit demanda le chasseur qui ne voyait
 guère ce qu'une fée pouvait attendre d'un humain.
Un son indescriptible pour l' oreille humaine jaillit de la petit bouche et
le jeune chasseur à la crinière de cuivre perdit consistance, puis il
rapetissa, glissant au milieux des branches qui le retenait.
Quand il eut fini sa métamorphose il était une petit écureuil roux.
 Aucun son ne sortait plus de sa bouche.


 La fée rit : "tu seras mon ylliü jusqu'à l'aube, et cela sera notre secret !
 Le marché ne pouvait être refusé.



 Le chasseur revint donc.
 La fée en faisait un petit animal.
 Elle avait un harnais d'or qu'elle passait autour de l' écureuil, elle
 grimpait sur son dos, et tous deux chevauchaient jusqu'à la cime des arbres.
Ils bondissaient de branches en branches, courant après les papillons de nuit.
 Puis lorsque la fée en avait assez ils s' installaient sur une branche et
tandis qu'elle entonnait des chants féériques, elle prenait le peigne de
cristal qui retenait ses cheveux de fée et entreprenait de remettre de l'ordre dans la toison de l'écureuil.

Au petit matin l'écureuil n'était plus et le jeune homme emportait toute la
 nourriture que ses fortes épaules pouvaient charger.



Sa famille ne posa aucune question trop contente de ce miracle.
La nourriture était délicieuse. Au début ils mangèrent tous comme des ogres affamés, puis ils finirent par être rassasiés.

Cependant le jeune chasseur ramenait toujours trop de nourriture.

Un jour où sa mère jetait des fruits qui s'étaient gâtés elle appela son fils:
- Quel dommage, il y a sans doute au village des gens qui paieraient cher
 pour de si bonnes choses, au moins nous ne les jetterions plus.

 En fait la mère qui ne craignait plus la faim ni pour elle ni pour ses
enfants commençait à penser qu'un peu d'argent serait le bienvenu. Elle
 pourrait changer les roues de leur chariot.

Le fils l'écouta si bien que la mère put acheter un chariot neuf.

Elle tenta à plusieurs reprise de savoir comment et où son fils obtenait
 toutes ces victuailles, mais il ne lui confiait rien, quant aux villageois,

ils ne posaient aucune question se contentant de venir avec leurs pièces d'argent

 La famille acquit des chevaux, fit agrandir la maison pour que chaque
 enfant ait sa propre chambre.



Ils avaient à présent une demeure de seigneurs. Comme on commençait de
convoiter leur aisance, la mère demanda aux meilleurs tailleurs de pierre
de construire une enceinte autour de leur petit château.

Un soir où le jeune homme se rendait a son rendez vous il fut surprit du
 froid qui régnait dans la forêt de Longue Mine.

La fée lui apparut et il ne vit pas tout de suite comme elle était pâle.
Cette nuit là ils ne montèrent pas jusqu'en haut des cimes et la fée
disparut sans même avoir dénoué ses cheveux d'or.

 Mais notre jeune homme repartit à nouveau chargé comme un baudet.



 L'hiver arriva, âpre rude et sans pitié pour les hommes et les bêtes.
Notre jeune et beau chasseur s' en allait quérir comme de coutume son dû.
Aux portes du bois de Longue Mine il trembla d'effroi .
La forêt était comme morte.
Le bosquet magique n'était qu'un amas de branches sans vie.
Dans la lumière pâle de la lune et le froid glacial, l'homme appela la fée,
mais cette nuit là, la fée ne vint pas.

Transi, terrifié et bredouille, il rentra chez lui au petit matin aussitôt
assailli de questions par les siens, incrédules .

Il ne put rien expliquer.

Il revint chaque nuit dans la forêt de longue mine, et ce durant tout un
cycle de lune.

 Au vingt huitième jour dans le bosquet mort la table était à nouveau là
mais en guise de banquet orgiaque, il ne s'y trouvait qu'une miche de pain.

 Rendu agressif par l'attente qui durait, il lança fort en colère :
 "Mais que signifie cela ? Que veux tu que je fasse d'une miche de pain ?!"
 Une lueur pâle vola près de lui, la fée elle aussi était revenue mais si
 faible qu'elle semblait translucide.
 - Nous avions un marché, pesta le jeune chasseur
 - Pardonne-moi mais je suis si faible, crois-tu que tes exigences aient été
 si facile à satisfaire, je suis une toute jeune fée, je n'ai que deux mille
 ans et je suis épuisée, ma magie est si faible elle aussi.
 - Penses un peu à ma famille, et à tous ces gens qui comptent sur moi,que
 vais je leur rapporter....du pain sec et gelé ?

 Il y eut un instant où sur le petit visage de la fée apparut une grimace :

 "J'ai rempli et bien rempli ma part de notre marché, petit chasseur et toi
tu n'as jamais daigné me remercier pour mes bontés.
 - Je faisais tous tes caprices vociféra l' indélicat.
 - Et que fais tu de mon coeur de fée ? Tu ne t'es jamais soucié de moi ?
 J'ai eu pitié de toi alors que tu venais piller ma forêt, je t'ai fait
 confiance et c'est tout ce que tu trouves à me dire ? N'as tu point craint
pour mon existence un seul instant ?

 Le jeune homme avait perdu de son assurance, car, voyant sa féérique amie
 s'emporter, il lui revint à l'esprit des histoires terribles sur la colère des fées.
 Et tandis qu'il se demandait s'il n'avait pas un peu abusé tout de même de
 la générosité de sa fée, celle-ci se mit à changer de couleur, car tout ce
 temps, bien que voulant croire son humain sincère, la fée, chaque fois un
 peu plus, sentait son coeur se dessécher.
 - Tu n'avais aucun sentiment pour moi! -siffla la petite créature dont les
 ailes autrefois dorées étaient devenues d'un pourpre presque noires- Tu es
 égoïste et intéressé ! Jamais plus je n'aurai pitié de vous autres les hommes !

 Et avant même que le jeune chasseur n'ait émit un souffle, le bois se mit à
 tournoyer, soulevant la terre glacée en un nuage sombre et opaque, qui
 s'enroula autour du jeune ingrat.

 Lorsque le nuage se dissipa, il ne subsistait qu'un petit écureuil roux
transi de froid !

 La fée rit et pleura.

 Le chasseur en oublia jusqu'à son existence d'homme, prisonnier à tout
 jamais de son corps d'animal.



 Il vit encore dans le bois de Longue Mine et il ne garde de sa vie d'avant
 qu'une étrange habitude. Il amasse de la nourriture, et la cache dans son
 trou d'arbre, et de temps à autre en riant la fée vient lui chaparder un peu de victuailles.

 Alors l' écureuil roux panique, repart dans les bois récolter sa pitance !

 Il ne faut jamais décevoir une fée car leur colère est des plus terrible et
 leur pouvoir n'a pas de limite.

Récit: tous droits réservés

Crédits photos Pexels

la fée: Mary Babkova

l'écureuil: David Selbert

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